Est-ce que vous connaissez Hideo Levy ? Il y a plus de dix ans, après avoir lu son livre d'essais "Ma chambre d'écriture le japonais (日本語を書く部屋)", j'ai éprouvé un vertige léger. Hideo Levy est Américain, et il a passé son enfance à Taiwan (son père était diplomate). Presque tous les Japonais ne peuvent pas écrire le japonais que cet auteur écrit, avec le style à facettes, en utilisant habilement les mots anciens de Yamato. On dit que la différence entre l'anglais et le japonais est trop frappante. Comme Hideo Levy était professeur de l'Université aux Etats-unis, il a disséqué le Man'yōshū (万葉集, recueil de dix mille feuilles). Je veux déplore parfois mon niveau de français, mais son livre m'en interdit.
Hideo Levy a écrit en japonais un roman en 1992, certains Japonais y ont résisté. Pourquoi ? Parce qu'ils pensent que seulement les Japonais possèdent la langue japonaise, . Quel orgueil !! Alors, nous (les Japonais) considérons que les occidentaux ne peuvent pas facilement apprendre le japonais !! En fait, il y a des experts occidentaux en japonais comme lui. Probablement, je me demande si les Japonais ne souhaitent pas que la langue japonaise soit donnée au monde occidental, et s'ils veulent accaparer le japonais.
Cet été, j'ai lu son autre livre "Mon japonais (我的日本語)". Il affirme qu'écrire en japonais est radical pour lui. Il indique que "I" n'est que "I" en anglais, mais il y a des variations de "I" en japonais. Je n'y avais jamais pensé. C'est trop naturel pour moi. Combien de "I (Je)" en japonais ? "私","僕","俺","我","吾","余", et "拙者" etc., tous ces caractères chinois sont traduits par "Je". En outre, cet auteur dit que l'on peut écrire "私" en Hiragana et en Katakana, donc "わたし" (Hiragana) et "ワタシ" (Katakana). Cette distinction apporte certainement une nuance. Par exemple, un garçon donne une réplique dans une BD ou un roman, "ぼく" et "ボク" sont utilisés souvent, ils comportent un élément enfantin plus que "僕" (caractère chinois). Hideo Levy utilise et écrit un tel japonais, c'est un excitation bilingue.
Paradoxalement, j'écris en français cet article, est-ce radical ? Lorsque j'écris en français, je dois utiliser trop de "Je", je me sens mal à l'aise à cause de cela. Dans la conversation en japonais, je n'utilise pas tellement "Je". Ce n'est pas nécessaire, l'utilisation de "Je" est plutôt pour insister sur mon être. Ici, je me souviens du livre "Vers l'extérieur du japonais" (日本語の外へ) de Kataoka Yoshio (écrivain et traducteur). Dans ce livre, la relation entre le locuteur (je) et l'interlocuteur (tu, vous) change et dépend de chaque situation, les mots qui signifient le locuteur et l'interlocuteur existent à l'infini, de telles choses sont écrites. En somme, la relation humaine (la hiérarchie) reflète la variation du sujet (私, 僕, 俺 etc.) C'est embêtant.
L'apprentissage de la langue étrangère provoque de temps en temps une réaction chimique dans un sens. La sensation des mots dans la langue maternelle qu'on a obtenu jusqu'à maintenant peut être bouleversée. Hideo Levy raconte un épisode qui concerne cette sensation des mots. Il aspirait au Man'yōshū, quand il a visité Nara pour la première fois, à ses 19 ans, mais il a été déçu devant la montagne d'Amanokaguyama (天香久山) qui se trouve à Nara. Il a eu l'impression que cette montagne était comme une colline. Je crois que cet auteur ne devait pas saisir le moyen d'expression "見立て (mitate)" à cette époque-là. Qu'est-ce que c'est "Mitate" ? J'essaie de vous l'expliquer brièvement. On dit que le jardin japonais représente le paysage naturel. Par exemple, la ride d'une plage représente une vague de la mer et un courant de la rivière. On accumule de la terre, on en fait comme une petite montagne, de plus on la fait couvrir de mousse. Ce paysage est extrêmement artificiel, mais nous (les Japonais) éprouvons l'essence de la nature. Même si la montagne d'Amanokaguyama était comme une colline, nos devanciers imaginaient la montagne grandiose. Dans mon cas, lorsque j'ai vu le jardin des Tuileries et celui de Versailles que Le Nôtre a jadis conçus, c'est évidemment beau, néanmoins j'avais du mal à m'assimiler à ces jardins.
À propos, Hideo Levy a visité Taiwan, ça fait 52 ans, ce voyage a été tourné en tant que film documentaire. C'est dommage que je l'aie raté. J'aimerais le voir, il n'y a pas ce DVD à la bibliothèque municipale. J'ai vu cette bande annonce plusieurs fois. Et puis, je ne sais pas pourquoi, j'aimerais voir encore une fois le film "Un temps pour vivre, un temps pour mourir" de Hou Hsiao-hsien.
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